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MADAME DE STAËL D’APRÈS SES PORTRAITS

le monde. C’eut été manquer le but principal qui vous distingue tant et qui fait que l’on vous cherit avec raison et vérité.

Ne m’oubliez pas, je vous prie, madame ; moi, il m’est impossible d’oublier le séjour de Coppet. Rappelez-moi aussi, je vous prie, à tout ce qui vous entoure. S. A. R., assures le de mon respectueux souvenir. Mille tendre compliments à Mme Récamier. Je prie aussi votre charmante petite de penser quelque fois à moi. J’en raffole ; elle est si belle, si aimable, si intéressante. En tout, je ne veux pas être oubliée même de vos amies qui étoient pressant lors de mon séjour. J’ai passé chez Mlle de Bouffers pour lui donné des nouveles de M. de Sabran mais elle n’y etoit pas. Mes compliments aussi à Oreste[1] et a M. vos fils.

Receves, Madame, l’assurance bien sincere de mes sentiments distingués et d’attachement avec lesquel je suis.

Votre tres humble
servante et dévoué
Le Brun.


Je verrai incessament le graveur et j’aurai l’honneur de vous écrire à ce sujet mais je désire que le tableau soit encore plus avancé dans les accessoires[2]. »

Mme Le Brun garda le portrait plus d’un an. Le 9 janvier 1809, Mme de Staël le réclamait à Mme Nigris, fille de l’artiste : « Aurez-vous la bonté de me dire quand le portrait de Corinne me sera remis par Mme Le Brun ?[3] » Le 4 février, Mme Nigris excusait sa mère et la montrait toute occupée à vernir le tableau : « Ma mère me charge de vous dire, Madame, que crainte d’altérer les couleurs de votre portrait, elle n’a voulu le vernir que le plus tard possible ; c’est ce qui l’a obligée à le garder si longtemps ; elle compte vous l’envoyer à la fin de mars ou dans les premiers jours d’avril[4]. » Le tableau arriva à Coppet avec les beaux jours de juillet ; « J’ai enfin reçu votre magnifique tableau, Madame, et, sans penser à mon portrait, j’ai admiré votre ouvrage. Il y a là tout votre talent et je voudrais bien que le mien pût être encouragé par votre exemple, mais j’ai peur qu’il ne soit plus que dans les yeux que vous m’avez donnés[5]. »

  1. Oreste, M. de Sabran (L. Achard, op. cit.. p. 319).
  2. Archives du château de Coppet. Lettre de Mme Vigée-Lebrun à Mme de Staël. La lettre n’est pas datée.
  3. Vigée-Lebrun (Mme), Souvenirs, II, p. 194. Lettre de Mme de Staël à Mme Nigris.
  4. Archives du château de Coppet. Lettre de Mme de Nigris à Mme de Staël, 4 février 1809.
  5. Vigée-Lebrun (Mme), Souvenirs, II, p. 194.