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plesles plus lointains. Chaque auteur a trouvé sa veine, et chaque catégorie de lecteurs a choisi, dans cette immense pléiade, l’écrivain qui répondait le mieux à ses goûts littéraires ou plutôt à ses caprices libertins et intellectuels.

Les étudiants, les gens du peuple, les bourgeois oisifs, les blasés du plaisir, les petites apprenties, les ouvrières, les employés des deux sexes, les collégiens, les jeunes filles, les habitués des hôtels, des casinos, des salons de lecture et des bibliothèques publiques, les liseurs et les liseuses qui prennent tout ce qui se présente, les uns par curiosité malsaine, les autres par passe-temps, les uns en cachette, les autres sans vergogne, se sont livrés et se livrent encore, impunément et à très bon marché, aux silencieuses orgies de la pensée, avec la foule des malfaiteurs littéraires.

Le succès est d’autant plus facile que des dirigeants de tout ordre accueillent, écoutent, fêtent et glorifient ces auteurs et leurs ouvrages avec un ensemble, une insistance et une sympathie qui en imposent chaque jour davantage. Le monde, qui est, selon Jules Lemaître, cette association élégante et riche pour le plaisir, où fleurissent naturellement la sensualité, la galanterie, la vanité, la curiosité physique et morale, le monde leur accorde droit de cité, comme à des amuseurs, des directeurs et des éléments indispensables de la vie heureuse. Des revues très féminines, des magazines très chics et d’autres revues non moins frivoles, qui se vantent d’avoir 130 mille abonnés, consacrent à ces idoles du jour, outre des illustrations, des notices et des éloges chargés d’hyperboles et de répétitions. Toute une société, formée en bonne partie de catholiques pratiquants, considère comme une nécessité de bon ton de lire tous les romans à la mode, et sous prétexte que l’art purifie tout, qu’il faut bien tout connaître et se tenir au courant, fréquentent les auteurs impies et immoraux