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ROMANS À PROSCRIRE

L’expérience même démontre que les personnes du monde, habituellement trop peu pourvues d’instruction et de convictions philosophiques ou religieuses, sont, sans s’en rendre bien compte elles-mêmes, plus sensibles à des lectures irréligieuses, rationalistes ou voltairiennes qu’à des lectures obscènes. Un chrétien ou une chrétienne qui auront lu des romans frivoles et immoraux, reviendront assez facilement et intégralement à des habitudes plus sérieuses et plus conformes à la vertu ; mais s’ils se sont adonnés à des lectures impies, la ruine morale est complète : il semble que les fondations mêmes de l’édifice ont été arrachées, ou, pour rappeler un mot du poète incrédule, il semble que

La mer y passerait sans laver la souillure :
Car l’abîme est immense et la tache est au fond.

Et ce sont ces écrivains qui, aux yeux de ceux qui les lisent ou qui les vantent, ont seuls qualité pour régner dans le domaine des lettres et gouverner le monde des âmes.

Certes, nous ne nions pas leur talent : la plupart en ont été richement dotés par la Providence. La poésie, l’éloquence, le sens le plus délié de l’observation, l’analyse des sentiments, le prestige du style, l’art de là mise en scène, la psychologie la plus pénétrante, quand ils ne les égarent pas dans le faux, l’invraisemblable et l’outré, leur ont inspiré des pages qui seraient l’honneur de la littérature française, si elles n’étaient trop souvent gâtées par le voisinage de scènes luxurieuses.

Malheureusement, ils ont profané tous les dons de leur esprit par leur libertinage et ne s’en sont servis que pour mieux séduire leur public.

C’est par millions que depuis 50 ans, ces livres ont été répandus dans les masses, et jusque chez les peu-