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le débutant

en guise de bâton armé d’un clou pointu, il avait manié la plume. Comme au temps où il était écolier, s’il eût voulu s’incliner bien bas et faire sa cour aux personnages détenant le pouvoir, choyé, comblé d’éloges, il eût récolté de beaux prix. Mais lorsqu’on avait tenté de le contraindre à dissimuler ses sentiments, son geste avait toujours été le même que lorsqu’il jeta par terre l’adresse enrubannée, devant monsieur le curé et les commissaires d’écoles ahuris.

Le lendemain, Paul Mirot partit pour Mamelmont, terminer sa convalescence. L’oncle Batèche et la tante Zoé le trouvèrent bien changé. La tante pensa tout de suite à la mauvaise femme, et chaque fois que son vieil époux voulait faire allusion à celle qu’il avait considéré un instant comme sa future nièce, elle lui faisait signe de se taire. Bientôt ce fut la saison des sucres, puis le printemps radieux avec sa verdure et ses oiseaux. Après un mois de cette vie au grand air, le jeune homme se sentit de nouveau fort et courageux. C’est alors qu’il envisagea froidement le problème de l’avenir. Retourner à Montréal, reprendre le métier de journaliste, il ne fallait plus y penser. Il avait bien la ressource de demeurer à la campagne, de s’intéresser à l’agriculture ; mais il n’était pas encore à l’âge où l’on renonce avec joie à l’existence fiévreuse et passionnante des villes, une fois qu’on y a goûté. Son ami Vaillant, dont il avait reçu plusieurs lettres, le pressait de plus en plus d’aller le rejoindre à New-York où il trouverait tout de suite amitié et situation. Flora joignait ses instances à celles de son mari et lui promettait de lui faire épouser la plus belle et la plus riche de ses compatriotes. Son cœur et sa raison le convainquirent que c’était là le parti le plus sage à prendre.

De Germaine Pistache il n’avait pas eu de nouvel-

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