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le débutant

fauteuil et, au moment où il s’approchait de sa toilette pour ôter son faux col, il y trouva un billet griffonné à la hâte, apporté durant son absence. Ce billet déposé là, à quatre heures du matin, lui apprenait la maladie subite de Simone qui réclamait dans son délire, sa présence auprès d’elle. Au bas du papier, il lut la signature de l’ancienne couturière. Ainsi, pendant qu’il s’amusait au bal où elle l’avait supplié de ne pas aller, pendant qu’il se laissait prendre au charme de cette Germaine, qu’il détestait maintenant, qu’il accusait injustement d’avoir voulu le séduire en se faisant accompagner jusque chez elle, Simone qu’il avait tant aimée, à qui il devait d’avoir surnagé au naufrage de ses illusions, d’avoir résisté aux déboires qui l’attendaient au début de son apprentissage de journaliste, cette femme qui l’avait fait-homme, agonisait. Et il n’était pas là pour répondre à son premier appel. En ce moment sa conduite lui paraissait tellement odieuse qu’il eut accepté n’importe quel châtiment pour lui épargner une minute de souffrance.

La tempête continuait de plus belle et il fallut au jeune homme plus d’une demi heure pour se rendre au petit appartement de la rue Peel, en marchant péniblement dans la neige jusqu’à mi-jambe. Ce fut la femme Moquin qui le reçut. Il l’interrogea aussitôt avec anxiété. Elle lui apprit que madame Laperle, après avoir lu la réponse à la lettre qu’elle lui avait envoyé porter, pleura beaucoup ; puis, qu’elle était sortie par cette tempête, sans prendre le temps de s’habiller chaudement, et qu’elle n’avait pas voulu lui dire où elle allait. Revenue vers onze heures, toute mouillée d’avoir marché dans la neige, toute grelottante de froid, elle eut une nouvelle crise de larmes, suivie de frissons auxquels succéda une fièvre intense. Quelques minutes après trois heures, elle l’avait sup-

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