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le débutant

question de rien. À cette époque son tuteur fit un petit voyage à Saint-Innocent, chef-lieu du comté de Bellemarie, où s’élevait, à côté de l’église, l’imposant édifice du collège.

Quelques semaines plus tard, conduit par l’oncle Batèche, le petit orphelin faisait de bonne grâce son entrée au collège.

Au collège comme à l’école, Paul Mirot fut un très brillant élève, et c’est à son application à l’étude, à sa facilité d’apprendre et de résoudre les problèmes les plus abstraits, qu’il dut de ne pas être renvoyé, vingt fois plutôt qu’une, chez son tuteur, pour avoir manqué d’obéissance. Malgré la règle sévère de la maison, ses professeurs le surprenaient souvent, caché dans quelque coin, lisant des livres défendus que lui apportait secrètement Jacques Vaillant, un camarade roublard, fils du député Vaillant, ou bien, dissimulé derrière les bosquets, au fond de la cour du collège, regardant l’herbe pousser et les oiseaux voltiger sur les branches. Selon la saison, il choisissait ses sujets d’études, durant les heures consacrées aux pieuses méditations.

Ses professeurs, de même que le vicaire qui l’avait préparé à faire sa première communion, lui prédirent qu’il ne ferait jamais rien de bon.

À vingt ans, il avait terminé ses études et revenait prendre place au foyer de ses parents d’adoption. Qu’allait-il faire ? Il n’en savait rien. Au collège de Saint-Innocent on ne s’occupait que de diriger ceux qui avaient la vocation religieuse. L’oncle Batèche voulut qu’il se fît curé pour goûter le suprême bonheur d’aller finir ses jours dans un presbytère, dont la bonne tante Zoé serait la ménagère. C’était, disait-il à son neveu, le meilleur méquier, pas de mauvaises récoltes, ben logé, ben nourri, tout à soi

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