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le débutant

— Y’a un boute pour le laisser varnailler. J’veux pas qu’y fasse un bon à rien. On va l’renfarmer.

Évous ?

— C’est ben simple, batèche ! y faut qu’y s’instruise, comme dirait son défunt père ; on va l’mette au collège de Saint-Innocent, là y sauront ben l’dompter.

Paul ne savait pas au juste ce que c’était qu’un collège ; mais il aimait l’étude, il voulait s’instruire, la résolution prise par son tuteur, le laissa parfaitement indifférent, dans l’état de détresse où il se trouvait. La perspective de jeûner jusqu’au lendemain et de coucher dehors, le préoccupait uniquement à cette minute solennelle du retour au bercail. Sans en entendre davantage, il pénétra dans la pièce où l’oncle et la tante mangeaient sans appétit leur bol de pain trempé dans du lait, le miton, le mot favori des vieux époux. On ne lui dit rien. La tante le fit asseoir à sa place habituelle où, les yeux en même temps humides de chagrin et de satisfaction, il mangea comme un petit crevé. Puis, il s’endormit sur le bord de la table

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