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le débutant

Paul Mirot qui lui sauta à la gorge en lui criant, la voix tremblante de colère : C’est toi, ivrogne, vil souteneur, qui a fait cela !… Et à plusieurs reprises il le souffleta en pleine figure. Le reporter du Populiste se débattit, essaya d’appeler au secours, mais son adversaire le saisit à bras-le-corps et l’envoya rouler dans la poussière.

Le soir, on envisagea froidement, la situation : elle n’était pas rose. L’honorable Vaillant, profondément affecté par les événements de l’après-midi, ne conservait que peu d’espoir dans le résultat final de la lutte. Il est vrai qu’il pouvait compter sur le ferme appui de la majorité des électeurs de quelques paroisses, telles que Mamelmont, mais dans les autres paroisses il eut fallu beaucoup d’argent, pour contrebalancer l’effet des sermons du dimanche et de la corruption des consciences par le docteur Montretout, qui achetait les votes à n’importe quel prix. C’était, du reste, une manœuvre à laquelle l’ancien ministre n’avait jamais voulu se prêter.

Toute la méprisable et nombreuse catégorie d’électeurs pour qui le mot élection veut dire bombance et argent, voyant que la lutte était chaude, s’en réjouissait. Aux élections précédentes, ces individus que les anglais qualifient de l’épithète méprisante de suckers, n’avaient pas eu de chance : la popularité de Vaillant était trop grande et, partant, la lutte trop inégale entre lui et ses adversaires pour que l’on en puisse tirer grand profit. Aussi se promettait-on de se rattraper, le cas échéant. C’était le moment d’agir et dans la soirée, l’hôtel où se retiraient l’ancien député du comté et son jeune ami, tous les individus louches se présentèrent et demandèrent à parler à leur candidat. Tous protestèrent de leur dévouement et lui offrirent leurs services. Ils ne demandaient rien

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