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le débutant

du lundi au samedi, resta encore assez lourde. Cependant, ni Jacques ni Paul ne songèrent à se plaindre de leurs fatigues, heureux d’être libérés de cette servitude les obligeant, au Populiste, à n’être que des machines et non des hommes.

Madame Laperle qui, depuis le mois de mai, avait abandonné son appartement de la rue Saint-Hubert pour aller demeurer dans le quartier anglais, rue Pool, où elle était libre de recevoir Paul Mirot aux heures qui lui plaisaient, éprouva une grande joie à l’apparition du nouveau journal, voyant dans cet heureux événement le présage d’un brillant avenir pour celui qu’elle avait soutenu de toute sa tendresse féminine et dorloté comme un enfant, aux jours angoissants d’incertitude du lendemain qu’il venait de traverser.

Jacques Vaillant ne devait pas tarder à éprouver, à son tour, la félicité à la fois douce et réconfortante que procure aux êtres les mieux trempés pour les luttes de la vie, la hantise de la femme aimée présidant à tous vos travaux, vous accompagnant pas à pas dans le va-et-vient journalier d’une existence active, avec qui vous causez dans la solitude, en parlant pour elle et pour vous.

Un jour, en venant au Flambeau corriger les épreuves de sa page féminine, mademoiselle Louise Franjeu amena avec elle Miss Flora Marshall, une jeune américaine, étudiante à l’Université McGill, qu’elle présenta à ses camarades en journalisme. C’était une belle fille, grande, robuste comme la plupart des américaines, qui commencent de bonne heure à la Public School à faire de la Physical Culture. Elle avait de beaux yeux bruns, aux éclairs d’or fauve, et une abondante chevelure d’un blond ardent. Miss Marshall, à vingt-deux ans, ne ressemblait en rien à la vierge

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