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le débutant

torales et même sur le parquet de la Chambre. Pour me consoler d’avoir renoncé forcément à la carrière des lettres, me conduisant tout droit à la famine, je me suis appliqué à devenir un tribun populaire et j’y ai trouvé de réelles compensations. Ce qu’on ne lirait pas, si je l’écrivais dans un journal, je le fais pénétrer dans les esprits par le geste, qui dompte les masses, la parole, qui s’empare de l’attention de la foule, la captive peu à peu, lui communique son enthousiasme, pour la convaincre ensuite. Un beau succès oratoire, c’est quelque chose. L’éloquence est une force susceptible de lancer dans la voie du progrès et des réformes nécessaires ceux qui, par manque d’instruction et de logique, ne sont que des êtres impulsifs.

Le ministre prit sur son secrétaire une petite feuille que lui avait apporté le dernier courrier de Québec, contenant, en première page, un article marqué au crayon rouge, et leur expliqua qu’il s’agissait d’une attaque très violente contre le gouvernement, à cause de son entrée dans le ministère. C’était L’intégral, qui prétendait que l’honorable Vaillant faisait partie du groupe avancé, rêvant de démolir nos saintes maisons d’éducation où régnait le Christ, nos collèges donnant une instruction supérieure à celle donnée dans les pays les plus éclairés d’Europe, pour les remplacer par des écoles laïques. L’auteur de cet article citait en même temps un passage de l’un des plus beaux discours du député de Bellemarie, dans lequel il réclamait pour le peuple plus d’instruction, plus de justice et plus de liberté. Un homme qui avait eu l’audace d’employer son talent, incontestable, à répandre de pareilles erreurs, méritait la réprobation publique, au lieu d’être élevé au poste d’aviseur de Sa Majesté. En de telles mains les intérêts de l’Église

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