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bien que l’esprit, plus particulièrement préoccupé du dernier substantif, oublie celui ou ceux qui précèdent : je ne connais point de roman, point de comédie espagnole sans combats ; l’humilité et la simplicité chrétienne. Dans tous ces cas l’ellipse sous-entend l’adjectif à chaque substantif. C’est donc à tort que Girault-Duvivier blâme les exemples de la seconde colonne[1].

EXERCICE PHRASÉOLOGIQUE.

Un talent, une habileté admirable.
Une force, une énergie peu commune.
Un pouvoir, un ascendant terrible.
Une humeur, un naturel féroce.
Son esprit, sa douceur, sa beauté, son ingénuité même est charmante.
Le naissance , la fortune, la couronne même est une chimère.

Une alliance, une paix inviolable.
Une modestie et un savoir peu commun.
La religion et la morale chrétienne, la sûreté et la salubrité publique.
Une force et une énergie extraordinaire.
Une sagesse ut une prudence surprenante.
D’une modération et d’une douceur évangélique.
D’un sentiment et d’une expression naturelle.

Une sagesse, une bonté, une douceur prodigieuse.
Les pieds et la tête nue.
Les yeux et la bouche ouverte.
Un savoir et une modestie peu commune.
Une noirceur et une perversité inouïe.
Une arrogance et une suffisance intolérable.
Un feu et un enthousiasme incroyable.



No CXVII.

adjectifs précédés de deux ou plusieurs subsantifs et ne se rapportant qu’au dernier.




EXEMPLES.

Le bon goût des Égyptiens leur fit aimer la solidité et la régularité toute nue. (Bossuet.)
Voici des êtres dont là taille et l’air sinistre inspirent la terreur. (Barthélémy.)

Le sourire est une marque de bienveillance, d’applaudissement et de satisfaction intérieure. (Buffon.)
De leurs dépouilles élevez de magnifiques trophées à la gloire de la religion et de la nation française. (Anquetil.)

Quelquefois, l’adjectif, précédé de deux ou de plusieurs substantifs, joints par la conjonction et, ne qualifie réellement que le dernier ; en pareil cas, il faut se garder de le mettre au pluriel ou de croire que l’ellipse le sous-entende devant chaque nom.

EXERCICE PHRASÉOLOGIQUE.

Un habit et un pantalon blanc.
Un bouquet et un vase doré.
Un habit et un pantalon collant.

Un manteau et un chapeau rond.
Les lois et l’autorité publique.
Le gouvernement et la force publique.

Une faim et une chaleur brûlante.
Ma pensée et la vérité toute nue.
Leurs manières et leur visage hideux.

  1. Aux exemples cités nous ajouterons les suivants : On doit éviter les mots et les actions défendues. (Voltaire.) — Le vent fut contraire ; le ciel et la mer belle. (Bern. de St.-Pierre.) — Ce peuple a le cœur et la bouche ouverte à vos louanges. (Vaugelas.) — Tous les mots de la langue et toutes les syllabes nous paraissent précieuses. (Racine.) — Cette opinion inspire aux uns un orgueil intolérable, en leur persuadant qu’ils sont revêtus d’une origine et d’une puissance céleste. (Bern. de St.-Pierre.) — Auguste honora les lettres de cette protection et de cet attachement réel qui dans un souverain, est si capable de les faire fleurit. (Domergue.) — C’est comme une espèce d’enthousiasme et de fureur noble qui anime l’oraison, et qui lui donne un feu et une vigueur toute divine. (Boileau.) — Les Grecs appelaient du nom de satires des drames d’une licence et d’une gaîté burlesque. (La Harpe.) — Le jour même que, sur l’autel de notre père, tu consentiras avec moi, à nous jurer une alliance et une paix inviolable, ton trône, ton empire, tout te sera rendu. (Marmontel.) — Armez-vous d’un courage et d’une foi nouvelle. (Racine.) — Quand cet enfant esclave et tyran, plein de science et dépourvu de sens, est jeté dans le monde, il fait déplorer la misère et la perversité humaine. (J.-J. Rousseau.) — Songez ce que c’est que d’avoir des bras et des jambes cassées. (Mme  de Sévigné.)