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que celle du Pontife romain. Nous avons appris par ceux de nos frères qui sont dans la maison de César, que Valérien Auguste est devenu la proie des magiciens d’Egypte. Les Barbares ayant attaqué l’Empire, ils lui ont promis de le faire triompher de ses ennemis, grâce à leurs enchantements. On dit, en effet, que les Alamans ont franchi le Rhin, que les Goths s’apprêtent à passer le Danube et les Perses l’Euphrate. Les magiciens, hommes scélérats et abominables, ont persuadé à Valérien que ces malheurs sont dus à sa tolérance pour notre religion très sainte et aussi à sa complaisance pour les mages de Ctésiphon, leurs rivaux. Déjà, deux de ces derniers, accusés d’avoir prédit la pourpre à Macrianus, chef des armées d’Orient, ont été brûlés vifs. Chose horrible à dire, des sacrifices d’enfants ont eu lieu au Palatin. Les entrailles de ces victimes innocentes n’ayant pas révélé d’auspices intelligibles, les magiciens d’Egypte ont déclaré alors que la faute en était à nos sortilèges qui contrariaient les leurs. De là, un redoublement de haine contre les chrétiens. Un des nôtres, un carrier du nom d’Hippolyte, a été décapité avec toute sa famille, qu’il avait convertie à la foi du Christ. Quelque temps après, deux époux chrétiens, Chrysanthe et Daria, furent, par l’ordre du préfet de la Ville, enterrés vivants dans une carrière de sable, près de la voie Salaria nouvelle. Le bruit court enfin que, dans les conseils de l’Empereur, un édit se prépare contre nous, dont on veut confisquer les biens, et empêcher les réunions sous peine de la torture et du dernier supplice.

Nous avons jugé bon de te faire connaître ces choses, afin que tu règles ta conduite d’après elles, selon ta grande sagesse et pour le salut de ton troupeau. Nous souhaitons, vénérable Père, que tu te portes toujours bien en Dieu.


À travers les ternes expressions de ce style protocolaire, Cyprien avait entrevu les foules hurlantes brisant les stèles des cimetières, pillant les églises, lâchant dans