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Et, s’adressant au diacre Pontius :

« Toi qui as été lecteur et qui possèdes une belle voix, je te prie, donne-nous le prélude. »

Le diacre connaissait par cœur tout le psautier. Aussitôt, il entonna le début du Psaume onzième :

« Sauve-moi, Seigneur ! Il n’y a plus de saints, et les vérités sont diminuées par les enfants des hommes

— Non ! pas celui-là ! interrompit aussitôt Cyprien ; un autre, qui réponde mieux à l’allégresse de la Pâque ! » Alors Pontius commença le Psaume huitième :

« Seigneur, notre Seigneur, que ton nom est admirable par toute la terre ! Ta magnificence s’est élevée au-dessus du firmament… j’irai voir tes cieux, l’œuvre de tes doigts, la lune et les constellations que tu as créées… »

Les assistants répétaient en chœur les versets qu’ils avaient retenus. Le ciel nocturne, avec son fourmillement d’astres, se déployait au-dessus de leurs têtes, et, tout autour d’eux, sur les genêts et les asphodèles, sur les cistes et les myrtes en fleurs, les lucioles éphémères, étincelles palpitantes, ferventes, innombrables, tourbillonnaient comme une pluie d’étoiles. Quand Pontius chantait seul, il y avait une courte pause, pendant laquelle on entendait, sous les taillis, la mélodie infatigable du rossignol. Mais le chœur des voix pieuses reprenait bientôt, couvrant tous les murmures et tous les bruits. La petite flûte païenne se taisait, perdue dans le grand vent sonore de la harpe royale, tandis qu’au loin les nomades, veillant auprès de leurs feux, se demandaient quelle était cette race d’hommes qui, comme l’oiseau du printemps, semblaient ne vivre que pour chanter.