Page:Bertrand - Sanguis martyrum, 1918.djvu/310

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

glorieux. Si quelqu’un des frères se plaignait de ces ténèbres de la mine où l’on rampait à tâtons comme des aveugles, Nartzal lui répondait que la nuit même est lumineuse pour les enfants de la Lumière… « Et qu’était-ce que ce délai de quelques jours pour ceux qui attendent la Lumière éternelle ?… » La mèche charbonneuse des lampes exhalait « la divine odeur du Christ ». La tonsure des forçats était « une couronne de gloire ». Quand on suffoquait dans la fumée des torches, la poussière et les miasmes empoisonnés des tranchées, Nartzal s’écriait :

« Votre cœur se dilatera dans la joie !… Vous êtes l’or et l’argent de la mine, la richesse future du monde !… Vous êtes le froment dans les silos de l’Éternel !… »

À ces affirmations et à ces promesses magnifiques, des lettres d’encouragement, arrivées du dehors, faisaient écho. Malgré les pronostics de Mappalicus, les diacres avaient pu de nouveau pénétrer jusqu’à Sigus. Ce fut une fête pour les prisonniers, quand Jader déballa les provisions. Au fond d’une couffe on découvrit une épître encyclique adressée autrefois par Cyprien à tous les condamnés des mines et remise en lumière par Lucianus, le nouvel évêque de Carthage. Au milieu d’un silence recueilli, Cécilius en donna lecture.

Avec d’ingénieux artifices de style, des comparaisons fleuries, des allégories gracieuses et parfois un lyrisme éclatant d’images, l’évêque s’efforçait de leur démontrer qu’ils n’avaient pas à regretter dans leur prison souterraine le monde perdu pour la Justice… « Sans doute, disait-il, le soleil qui se lève illumine l’Orient, la lune errante inonde le ciel de ses clartés ! Mais Celui qui a fait ces deux astres vous est dans vos cachots une plus grande lumière. La splendeur du Christ qui se lève dans vos cœurs et dans vos esprits chasse les ténèbres de votre géhenne. Ce lieu de noirceur et de mort pour les autres est pour vous tout radieux de blancheur et d’éternité. Que vous dirai-je de plus ? La marche des saisons est la même pour vous que pour ceux qui voient le jour. L’Hi-