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horte de cavalerie, qui comprenait un corps d’archers palmyréniens, une véritable petite armée, irait châtier les rebelles. Mais avec Sidifann on ne pouvait pas procéder aussi brutalement. Passionné pour les femmes comme tous les indigènes, il cacherait sa captive. Il nierait l’avoir achetée, ou jurerait par tous les dieux du désert qu’il l’avait déjà revendue. Mieux valait employer la ruse contre lui. Et voici le plan qui fut imaginé par l’état-major du légat. On allait l’inviter à une grande chasse officielle, qui devait avoir lieu dans la région de l’Aurès, où une battue en règle venait d’être décidée, en effet, à la requête des colons. Depuis longtemps, les bergers se plaignaient des ravages causés par les panthères et les guépards, lesquels s’étaient prodigieusement multipliés après le retrait momentané, sous le jeune Gordien, de la IIIe légion Auguste. Les montagnards signalaient aussi des lions dans la partie boisée. D’habitude, on conviait à ces chasses quelques chefs indigènes et, bien que cet honneur fût lourd pour eux, — car ils devaient fournir des hommes, des bêtes et des vivres, — ils s’en montraient toujours très flattés et très avides.

Une estafette accompagnée de deux légionnaires à cheval alla porter à Sidifann l’invitation du grand chef. Le vieux bandit promit de venir avec un contingent de chasseurs. Pendant qu’il battrait les broussailles de l’Aurès, une turme de cavaliers, sous la conduite de l’option Victor, profiterait de son absence pour fouiller sa tente et les environs. Ses coffres devaient être pleins d’or, depuis le temps qu’il rançonnait les pasteurs des steppes et les agriculteurs des oasis. Ordre serait donné de saisir le produit de ses rapines : ce qui paierait largement les frais de la double expédition. Si l’on ne trouvait rien, ni le trésor, ni la prisonnière, Sidifann serait gardé comme otage à Lambèse. Le cachot et, au besoin, la torture finiraient bien par avoir raison de son entêtement.

Toute cette combinaison, avec les allées et venues indispensables, prit environ une semaine. Elle fut mortelle