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accouru pour accompagner son hôte au moins jusqu’à l’entrée des puits :

« Tu vois, dit-il à Cécilius, en lui montrant Victor et les soldats qui allaient et venaient sur la place, — j’ai suivi les conseils de ta Prudence : j’ai demandé des renforts à Lambèse.

– Et tu feras bien d’en demander encore !… Des mouvements suspects sont signalés, paraît-il, du côté d’Auzia. »

Ils baissaient la voix, en traversant le forum qu’emplissait toute une agitation matinale. La place du bourg servait de marché deux fois par semaine. Des légionnaires du détachement achetaient des légumes et des volailles à des paysans aux figures sauvages, accroupis sur les dalles, parmi leurs corbeilles et leurs paniers. Sous les arcades de la basilique judiciaire, un commissaire-priseur, assisté du crieur public, vendait de vieux habits. Les garçons du baigneur récuraient leurs chaudrons devant la porte des thermes, à l’angle de la rue qui descendait vers la mine. On longea les murs de l’école. Le maître primaire, armé de sa gaule, souleva le voile qui masquait la porte de la classe, pour voir passer l’imposant personnage à qui le procurateur faisait escorte. Et, tandis que les écoliers, de leurs petites voix aiguës, reprenaient la cantilène enfantine : « Un et un font deux, deux et deux font quatre, » celui-ci expliquait à Cécilius :

« Ce sont les enfants de nos scribes, de nos boutiquiers, de nos contremaîtres. Car, parmi ceux-ci, les uns sont ou bien des affranchis, ou bien des hommes libres comme ton guide Mappalicus… »

Mais un esclave qui, depuis quelques instants, suivait Théodore à distance, s’approcha de lui pour lui dire qu’on l’attendait aux offices. Cela parut contrarier vivement le procurateur, qui désirait ne quitter Cécilius qu’après l’avoir expédié sous terre. Il recommanda au contremaître :

« Tu feras passer le clarissime seigneur par le puits de