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germain, aussi cruel que dissimulé, et qui est l’âme du complot.

– Un Germain ! s’exclama Cécilius : il y a donc des Germains ici !

– Beaucoup, maître ! Ce sont des prisonniers de guerre. Celui dont je te parle a fini par se faire affranchir, à force de servilité devant les chefs. Il s’appelle Hildemond. Tu le verras, c’est un vrai bourreau ! Il flatte ses compatriotes, les Franks, les Goths, les Alamans, mais il frappe les Asiatiques, afin de les exaspérer et de les pousser à la révolte… »

Et, regardant autour de lui, d’un air toujours plus craintif, il chuchota :

« J’ai tout su par Gudden, le cordonnier, qui vient de mourir dans la mine et qui le tenait de son camarade de chaîne, un Goth chrétien… Je te prie, maître, écoute bien ce que je vais te dire !… Il y a, en ce moment, à Ténès, un fort contingent d’auxiliaires germains à la XXIIe légion Primigénia. Les sévérités de la discipline les ont, paraît-il, rendus furieux. Or, Hildemond a noué des intelligences avec ces hommes de son pays. Comme les Maures s’agitent, ils doivent marcher tous ensemble et venir délivrer leurs compatriotes qui sont dans les mines, après avoir opéré, ici, leur jonction avec les montagnards de Bagaï… Quelque chose du complot a déjà dû transpirer, car le procurateur a demandé à Lambèse de renforcer notre poste militaire. Le légat a envoyé un détachement de cavalerie sous la conduite d’un préfet. Tu les verras : ils sont campés auprès de nos puits…

– Et tu es sûr de ce que tu avances ? dit Cécilius. Comment as-tu pu savoir ?…

– Ah ! maître ! Tout est mystérieux ici, et, pourtant tout se sait : tu le vois bien !… Mais, je te le répète, il faut te hâter ! Demain, les mines peuvent être à feu et à sang… Le difficile sera de décider le vieillard Privatianus. Depuis que Gudden et Baric, ses deux compagnons, sont morts, il est comme découragé : il dit qu’il veut mou-