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TYCHO BRAHÉ

laisser détourner de sa voie en renonçant à la direction de son propre génie. Mais Tycho n’eut pas le temps d’établir à Prague l’ordre et la discipline de l’observatoire d’Uranibourg. Par une étrange faiblesse de notre nature, la tristesse et l’inquiétude, qu’il avait su maîtriser pendant ses disgrâces, triomphèrent de lui dans la prospérité : Tycho ne s’habituait pas à l’exil ; il ne pouvait détacher son souvenir de sa patrie d’adoption, qu’il avait nommée l’île du ciel. Son âme, abattue et distraite, tourmentée d’un dégoût invincible, conservait à peine quelques étincelles du grand feu qui suffisait pour animer Uranibourg. Une maladie cruelle de la vessie le rendit bientôt incapable de continuer ses travaux. Forcé de s’arrêter dans la carrière où depuis trente-huit ans il marchait sans relâche, il comprit que sa fin approchait ; il s’y prépara avec courage et mourut, le 24 octobre 1600, quinze mois après son arrivée à Prague, en faisant promettre à Képler de terminer ses tables et de veiller à leur publication.