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L’APPEL DU SOL

flant un peu. Ils respiraient à pleins poumons l’air du matin qui dissipait l’odeur de la poudre. Mais ils courbaient tous la tête sous la rafale, dociles, sans penser à rien. Ils étaient aplatis le long d’une digue de gazon bordant la rivière et derrière la barricade. Au-dessus d’eux les balles volaient, si nombreuses qu’elles paraissaient tisser une toile d’araignée. Un bruit de crécelle depuis un moment énervait les oreilles, dominait les détonations des fusils et l’énorme murmure des batteries.

— Ils ont installé une mitrailleuse, déclara Serre en se levant.

Il était debout. On eût dit qu’il avait dû percer de sa tête le réseau de fer. Il voulait reprendre en mains sa section. Le moment devenait critique. Les hommes se poussaient du coude, l’admirant. Il était correct et propre dans sa tunique, la jugulaire de son képi baissée, et tel qu’ils le voyaient aux jours de revues. Il avait pris pour cette première bataille son uniforme de fête dans sa cantine. Il ordonna :

— Attention à mon commandement… À