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LA RETRAITE

s’habitue à les voir. Mais leur nombre impressionne. Et puis voici qu’on les bouscule. Un train régimentaire passe sur la route, en sens inverse. Il faut lui faire de la place. Quelques hommes, harassés, se couchent sur le talus. On les piétine. Des batteries passent, toutes confondues, les minces canons de 75, les courts rimailhos avec leurs deux attelages. Sur chaque affût, sur chaque caisson, il y a des blessés ou des traînards. Parfois une paysanne s’est juchée là. Les conducteurs, hurlent, frappent les chevaux, bousculent les voitures, écrasent les soldats.

Tous les officiers du bataillon ont fini par se réunir sur le bord de la route. Quant aux hommes, ils ont déjà accepté cet état de choses. Ils ont tous regagné leur section. Des feux se sont allumés. On a pu boire du café. Le commandant a décidé de traverser le convoi, pour continuer son chemin. Et le bataillon défile, ruisselant d’eau, mais impeccable. On sent que les fuyards éprouvent, à le voir, une honte. Certains apostrophent les chasseurs à la hâte, pour s’excuser.

— Qu’est-ce que vous allez recevoir ?