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L’APPEL DU SOL

— Voulez-vous retourner à vos rangs ? fait-il d’une voix brusque à ses hommes.

Un sous-officier du train trotte le long de la colonne. Il passe devant le groupe des officiers. On ne lui demande rien. Mais il sait, lui. Il leur crie :

— Depuis vingt heures, nous battons en retraite sans arrêt. C’est épouvantable !

Personne n’a bougé. Le lieutenant Serre hausse les épaules. Il lui crie :

— Imbécile !

Lucien Fabre n’ose parler à Nicolaï. Nicolaï est très occupé à enlever la boue de son capuchon, avec son mouchoir. Mais le jeune homme n’est pas certain que ce soit la pluie qui ait rendu humides les joues de son capitaine. Pour lui, une lassitude sans bornes l’a envahi, une détente tragique, qui voudrait s’exprimer en un sanglot. Il cherche des yeux Vaissette. Vaissette est là, derrière, avec la section, qui regarde passer, les yeux dilatés, le lamentable défilé.

Et cela continue. À présent il y a autant de piétons que de voitures. Des canons avec des hommes jusque sur l’affût. De l’infanterie de