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L’APPEL DU SOL

Le sous-lieutenant allait proclamer son scepticisme. Mais il songea soudain que Vaissette était son inférieur. Alors, il se tut.

Vaissette avait un esprit subtil, dangereux et entêté. Il ajouta pour lui-même :

— Il faut tout de même bien qu’il y ait une direction…

Son lieutenant lui dit :

— Voilà bien la guerre. Nous ne savons rien : il faut marcher. Nous ne savions rien : il fallait nous faire tuer. Et nous n’apprendrons que nous sommes vainqueurs que par un ordre du jour du général en chef.

Un peloton de dragons passait sur le bas côté de la route, au grand trot. On criait : « À droite ! à droite. » La section s’écartait pour faire place aux cavaliers. Les chevaux vous éclaboussaient jusqu’au visage. Les hommes penchaient la tête sur l’encolure de leur bête, laissaient leur lance battre ses flancs. Le dernier, un maréchal des logis, énervait sa monture à coups d’éperons, afin de provoquer ces écarts qui suscitent l’admiration et la crainte des fantassins. Il avait un casque prussien pendu à sa selle. Les chasseurs se le mon-