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L’ASSAUT

égorgés, le cou saignant, le ventre ouvert par une grenade, les entrailles à nu.

Le boyau que Fabre faisait creuser sous la mitraille fut percé. On occupa l’entonnoir. Du reste, il n’était plus attaqué, faute de combattants.

Le capitaine de Quéré, qui commandait les deux compagnies, vint se rendre compte de la situation. Onze heures. Il fallait être prêt. Fabre avait les traits crispés et tendus. Quant à Vaissette, il était absolument noir, noir de poudre, de la tête aux pieds ; les raies de sueur creusaient des rides blanches sur son visage. Des plaques de sang avaient jailli sur sa vareuse et sur sa figure. Il était encore hébété, à la suite de l’effort physique fourni et à cause du bombardement. Il parlait à Fabre et à de Quéré, criant à tue-tête pour qu’on l’entendît, mais sans reconnaître ses camarades.

Autour de l’entonnoir, Angielli courait en gesticulant, l’uniforme déchiré, éclaboussé de sang. Il enjambait les morts et les blessés, qui ne l’arrêtaient pas dans sa course interminable. Il riait d’un rire éperdu.

Il était devenu fou.