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L’APPEL DU SOL

chées et de l’eau noirâtre qui croupit dans les cours des maisons flamandes. Il y a de l’eau partout, sauf dans les puits que vident dès le matin les petites pompes des paysans. On était loin des uniformes brillants des premiers mois. Le fermier, excédé de loger toutes ces troupes, et ne comprenant pas encore pourquoi l’on se battait et pourquoi les obus tuaient son bétail et défonçaient son champ, avait démonté sa pompe et retiré la corde de son puits. Il se disputait avec Angielli, qui ne parlait de rien moins que de lui faire un mauvais coup.

L’arrivée de Lucien rétablit le calme. Les anciens se pressèrent autour de lui. Ils n’étaient pas nombreux. La venue des renforts successifs, le départ des blessés, l’évacuation des malades, les morts, tout cela avait complètement transformé la compagnie : tout au plus comptait-elle une vingtaine des chasseurs du début. Mais son esprit subsistait, ses habitudes et sa tradition.

Quelques hommes justement venaient du dépôt et avaient rejoint le cantonnement : des paysans du Dauphiné et des Pyrénées, qui n’étaient guère différents de Rousset ou de