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L’APPEL DU SOL

sais plus qu’une chose : nos hommes et nous tenons dans la tranchée.

Le vent avait soufflé si fort, cette nuit-là, qu’il avait balayé, comme des feuilles mortes dans une allée, les brumes et tous les nuages du ciel. Les étoiles resplendirent. Au matin, le soleil se leva.

La veille, deux compagnies du 36e bataillon avaient donné l’assaut contre un ouvrage ennemi, démoli par nos pièces, et dont le saillant, armé de mitrailleuses, menaçait nos lignes. Des morts étaient étendus entre les tranchées. Par-dessus le parapet, entre les créneaux, on les voyait couchés, et les rayons roses de l’aurore baignaient leurs uniformes sanglants. On ne tirait plus. C’était un spectacle d’une tristesse infinie que celui de ces cadavres arrosés de lumière par les premiers feux du jour.

— Voilà, songea Vaissette, la triste végétation de cette plaine.

Et l’explosion subite de la chaleur et de la clarté printanières ne parvenaient pas à lui rendre le cœur plus léger.

Mais soudain il y eut un bruissement d’ailes,