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L’APPEL DU SOL

gées, à droite et à gauche, dans les bois. La quatrième restait sur le plateau, entre les lisières. Les hommes éprouvaient une impression de solitude. Ils semblaient habitués déjà au sifflement inoffensif qui fendait l’air. Le capitaine Nicolaï ne perdait pas des yeux l’espace qui s’étendait devant lui : au fond du décor il distinguait une haie, quelques arbustes.

Une détonation formidable retentit.

Nicolaï fit trois pas en avant, comme poussé par un courant d’air. Ses oreilles bourdonnaient. Il se retourna au bout d’un instant, encore stupide. Derrière, il y avait, dans l’argile humide, un trou béant, comme l’orifice d’un puits. La fumée se dissipait alentour. Un chasseur se relevait, à côté, et secouait ses vêtements tachés de boue. Les betteraves étaient déchiquetées. Elles glissaient, avec de la terre molle, au fond du trou qui se refermait. Une main crispée, raidie, émergeait, tenant un fusil, de la terre éventrée.

Les sections s’étaient arrêtées. On avait vu de partout l’éclatement de l’obus tombé entre le capitaine et sa compagnie. Un grand frisson passait sur tous les chasseurs : le premier