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LE BAPTÊME DU FEU

Il n’avait pas attaché grande importance à l’événement.

— C’est eux, répéta l’homme à son camarade.

La phrase avait fait en une minute le tour de la compagnie. Pour le coup, chacun se redressa. Une grande fierté venait de s’emparer d’eux : ils avaient reçu le baptême du feu. Inconsciemment, chacun ressentait un orgueil puissant. Une grande joie, en même temps. Ce n’était que cela !… Alors, ce n’était pas terrible. Il y eut comme une détente qui traversa tous les rangs. Le soleil montait enfin dans un ciel tout bleu. On avança plus allègrement.

— Ce n’est guère impressionnant, dit le sous-lieutenant Fabre au sergent Vaissette, qui était à côté de lui.

Vaissette rajusta son binocle et ne répondit pas. Il était naturellement expansif, étant méridional, et bavard, étant universitaire. Car, dans le civil, Vaissette enseignait la philosophie au lycée de Toulon. Mais il aimait, avant de parler, s’être fait une opinion.

On avançait, à présent, dans un champ de betteraves. La terre humide collait aux souliers.