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L’APPEL DU SOL

vallon. La patrie entière, ses guérets et ses champs, ses forêts et ses villes, voulait vivre ; et ses fils la défendaient. Ils obéissaient moins à l’appel de leur conscience, aux arguments de leur amour et de leur raison qu’à la voix de cette terre et de ce ciel, qui leur avaient servi de berceau et leur serviraient de sépulture. Ils étaient un peu de la France comme sa glèbe et comme ses moissons. Aux fleuves de couler indéfiniment comme l’histoire d’un peuple, aux arbres de développer à chaque printemps leur frondaison nouvelle, aux générations qui se suivent d’être les gardiennes sacrées de la Patrie.

Les hommes passent et ceux qui meurent pour elle ne réalisent pas la nécessité ni les effets de leur sacrifice. Ils n’en sentent point la beauté. Ils n’en espèrent aucune récompense dans un autre monde, où les patries sont ignorées. Ils sont inconscients de leur rôle et de sa grandeur. Ils n’ont pas plus de peine et pas plus de mérite à être la sauvegarde de la France et sa parure, que l’Île-de-France n’a de mérite à s’orner de ses crépuscules et que l’Alpe ou le Rhin gallo-romains