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LA BATAILLE

À droite, dans une clairière, deux batteries venaient d’arriver. Elles se mettaient en position en quelques secondes. Les artilleurs coupaient des branches pour cacher leurs pièces. Les conducteurs ramenaient leurs chevaux en silence. Les servants, enveloppés dans leur manteau sombre, battaient tranquillement la semelle. Huit canons s’alignaient : on les distinguait dans l’ombre.

L’éclairage vacillant des lanternes qu’on promenait faisait scintiller, comme un coffre d’or, les douilles des obus bien alignés dans les caissons. Il n’y avait pas de bruit superflu, pas un geste de trop. On eût dit l’agitation sage des abeilles autour de la ruche. Il se dégageait de là une impression d’ordre qui réconfortait les chasseurs. Quelques-uns s’étaient approchés des artilleurs.

— Vous allez leur en envoyer, hein ? pour nous soutenir, dit Bégou.

— On est ici pour ça, répondit un maréchal des logis.

Et il passait sa main sur le long affût gris, le caressant. Il y avait dans son ton un peu de pitié pour les fantassins ; dans la voix de