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L’APPEL DU SOL

même guère à la France. Tout cela c’était trop vague. Ils ne pensaient qu’à leurs reins où pesait le sac, au fusil qui sciait l’épaule, aux ampoules des pieds.

Rousset aussi était bavard. Malgré sa gorge sèche, le souffle court provenant de la vitesse de la marche, il parlait aux camarades qui l’entouraient, à Servajac, le plus silencieux et le plus docile. Rousset se plaignait toujours. Il était paresseux. Il était sale. On l’avait promu cuisinier. Il ne s’acquittait pas mal de sa fonction,
 
 
 
 
C’était un de ces paysans des plaines provençales, de ces riches vallées indolentes qui s’ouvrent des Alpes vers le Rhône, endormies sous leurs oliviers et leurs vignes, et dont les ravins sont fleuris de lauriers-roses et de figuiers.

Servajac était Cévenol : âpre et dur comme le roc de ses cimes déboisées, sauvage comme ses torrents ou comme le vent qui souffle sur les causses, il était taciturne et brave. On le