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Clos ta paupière, enfant, et ta bouche vermeille ;
Sommeille jusqu’au jour, sommeille en paix, sommeille.

Sommeille, et ne crains plus que les accents du cor
Viennent épouvanter tes doux songes encor.
Ces guerriers valeureux protègent ton enfance ;
Avant qu’un ennemi jusqu’à toi se glissant,
Dans ton berceau d’osier t’eût ravi sans défense,
Leurs glaives seraient teints du plus pur de son sang.

Clos ta paupière, enfant, et ta bouche vermeille ;
Sommeille jusqu’au jour, sommeille en paix, sommeille.

Trop tôt viendra le temps où le clairon vainqueur,
T’éveillant en sursaut, fera battre ton coeur.
Mais à présent, sommeille ; attends que l’aube naisse ;
Sommeille en paix, sommeille en cet heureux séjour ;
Car la soif des combats vient avec la jeunesse,
Comme le doux réveil avec l’aube du jour.

Clos ta paupière, enfant, et ta bouche vermeille ; Sommeille jusqu’au jour, sommeille en paix, sommeille.