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jourd’hui au tribunal de la justice pour lui porter leurs plaintes. C’est avec douleur que nous sommes contraints de le dire, on ne peut se dissimuler qu’il n’y ait un projet conçu, une société formée pour soutenir le matérialisme, pour détruire la religion, pour inspirer l’indépendance et nourrir la corruption des mœurs. »

Quelques années après, le 8 mars 1759, un arrêt du Conseil supprimait les lettres de privilège accordées pour l’impression de l’Encyclopédie. On avait publié sept volumes.

D’Alembert, fatigué de la lutte et effrayé non sans excellentes raisons, se retira définitivement.

Une lettre adressée à Voltaire fait connaître les motifs d’une résolution qui, malgré les vives instances de Diderot, demeura inébranlable : « Oui, sans doute, mon cher maître, l’Encyclopédie est devenue un ouvrage nécessaire et se perfectionne à mesure qu’elle avance ; mais il est devenu impossible de l’achever dans le maudit pays où nous sommes. Les brochures, les libelles, tout cela n’est rien ; mais croiriez-vous que tel de ces libelles a été imprimé par des ordres supérieurs dont M. de Malesherbes n’a pu empêcher l’exécution ? croiriez-vous qu’une satire atroce contre nous qui se trouve dans une feuille périodique qu’on appelle les Affiches de province a été envoyée de Versailles à l’auteur avec ordre de l’imprimer, et qu’après avoir résisté autant qu’il a pu jusqu’à s’exposer à perdre son gagne-pain, il a enfin imprimé cette satire en l’adoucissant de son mieux ? Ce qui en reste,