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— Une assez triste figure.

— Au sortir de là vous battiez le pavé.

— D’accord.

— Vous donniez des leçons de mathématiques.

— Sans en savoir un mot. N’est-ce pas là que vous voulez en venir ?

— Justement.

— J’apprenais en montrant aux autres et j’ai fait quelques bons élèves. »

D’Alembert, en cela comme sous beaucoup d’autres rapports, dissemblait de son ami Diderot : Diderot enseignait les mathématiques sans les savoir ; d’Alembert les savait, mais n’a jamais voulu vendre une heure de son temps.

« Demandez, dit ailleurs à Diderot le neveu de Rameau, son cynique interlocuteur, demandez à votre ami d’Alembert, le coryphée de la science mathématique, s’il serait trop bon pour en faire les éléments. » D’Alembert ne se posait pas la question, jamais il n’a formé d’élève, et jamais, dans le désir d’être compris des intelligences paresseuses et rebelles, il n’a fait effort pour être, comme disait Descartes, transcendantalement clair.

On raconte qu’un jeune homme abordant le calcul différentiel y rencontrait des contradictions qui, s’il est mal enseigné, peuvent réellement s’y trouver. Il osa consulter d’Alembert, illustre déjà et, comme disait Diderot, coryphée admiré des sciences mathématiques. La réponse est restée célèbre : « Allez en avant, la foi vous viendra ».