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traité de mécanique céleste dans lequel Laplace, qui l’a loyalement reconnu, a largement et fructueusement puisé. D’Alembert a repris la théorie de la lune esquissée seulement par Newton. Le problème appartenait à tous ; si Clairaut et Euler, en l’abordant en même temps que lui, y ont rencontré les mêmes succès, il faut se garder d’en conclure qu’il fût facile. Newton y avait échoué, et les forces réunies des trois nouveaux athlètes ont laissé à leurs successeurs un vaste champ à parcourir. Les observations se perfectionnent ; après les degrés sont venues les minutes, après les minutes les secondes, et aujourd’hui les dixièmes de seconde. Les calculateurs prétendent tout expliquer et y réussissent ; c’est en astronomie surtout que les détails sont la pierre de touche des théories. L’accord dans la théorie de la lune n’a pas été immédiat, et l’observation, en démentant d’abord le calcul, a éveillé de grandes émotions et provoqué d’ardentes discussions.

Diderot ne faisait qu’en rire et, sans rien entendre à la question, se faisait lire en la discutant. « Ce qu’il y a d’utile en géométrie peut, disait-il, s’apprendre en six mois. Le reste est de pure curiosité. »

Cela est vrai sans doute. Mais la poésie, la peinture, la métaphysique et bien d’autres produits de l’activité humaine sont aussi de pure curiosité ; si l’on doit pour cela les envelopper dans un même dédain, la barbarie deviendra l’idéal des sages et le vœu des gens sensés. « Il n’existe dans la nature,