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Un miracle, disaient-ils, doit être instantané et complet. Tout ce qui vient de Dieu a d’abord sa perfection. Ses œuvres sont achevées suivant la force du terme. C’est une vérité dont Moïse nous est garant. Quelque chose que Dieu fasse, il est impossible, dit le Sage, d’y ajouter ou d’en retrancher.

Oserait-on prétendre qu’il est impossible d’ajouter à une guérison imparfaite ? Elle n’est donc pas l’œuvre de Dieu.

Satan, le père du mensonge, qui remue le ciel et la terre pour susciter des ennemis à Dieu parmi les hommes, ne peut-il pas aussi faire des miracles ? On n’en peut pas chrétiennement douter. Les maléfices sont constants, les histoires en sont remplies, les confessions des malfaiteurs en font foi, les arrêts des cours souveraines le confirment. Mais le démon n’a pas la toute-puissance, il essaye, il tâtonne, il s’y reprend à plusieurs fois. Entre sa folle malice et la sage bonté de Dieu, la distinction devient facile.

Les malades guéris à Saint-Médard, après avoir ajouté neuvaines sur neuvaines, ne peuvent être, suivant cette doctrine, que des imposteurs ou des démoniaques. Un paralytique jette ses béquilles sur le tombeau du diacre, et rentre à pied chez lui, mais en boitant. Ce n’est pas Dieu qui fait ainsi les choses à demi, le miracle est un piège, l’apparente promesse une menace, et les convulsions qui la précèdent, les effets, dans ce lieu maudit, de la rage et de la furie du démon. Il n’est rien de mieux fondé sur les Écritures.