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qu’elle a su non seulement estimer, mais récompenser le courage imprudent et malheureux qui s’est trompé en osant la combattre ; que si quelques Français ont pris les armes contre elle, elle a voulu par son indulgence à leur égard témoigner à leur nation qu’elle ne la regarde point comme ennemie, et surtout qu’elle se souvient avec bonté de l’enthousiasme si juste que ses talents, ses vertus et ses lumières ont inspiré à la partie la plus éclairée de la nation. » Cette maladroite amplification de collège avait peu de chances de succès. Catherine répondit brièvement et sèchement :


« J’ai reçu la belle lettre que vous avez jugé à propos de m’écrire, au sujet de vos compatriotes prisonniers de guerre dans mes États, et que vous réclamez au nom de la philosophie et des philosophes. On vous les a représentés enchaînés, gémissant et manquant de tout au fond de la Sibérie. Eh bien ! monsieur, rassurez-vous et vos amis aussi, et apprenez que rien de tout cela n’existe. Les prisonniers de votre nation, faits dans différents endroits de la Pologne, où ils fomentaient et entretenaient les dissensions, sont à Kiovie (Kiew), où ils jouissent de leur propre aveu d’un état supportable. Ils sont en pleine correspondance avec M. Durand, envoyé du roi de France à ma cour, et avec leurs parents. J’ai vu une lettre d’un M. Galibert, qui est parmi eux, par laquelle il se loue des bons procédés du gouvernement général de Kiovie, etc. Voilà pour le