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TRAITS COMPLÉMENTAIRES DE LA FACE

partie aussi par nu soulèvement de toute la masse charnue de la joue. C’est un des rictus qui accompagnent le rire.

110. — Quant au sillon naso-labial, qui s’observe chez des sujets de tout âge, il n’est pas une ride à proprement parler. Son absence absolue chez un adulte serait presque une particularité assez rare pour faire l’objet d’une mention dans la rédaction du portrait parlé. Son caractère physionomique varie du tout au tout suivant que son maximum d’accentuation avoisine l’aile du nez (air triste et grave), ou l’angle de la bouche (air narquois), La première forme, qui semble dénoter le soulèvement des ailes du nez et du milieu de la lèvre supérieure, rappelle en effet la mimique caractéristique du pleurer, tandis que la seconde laisse supposer le relèvement des angles de la bouche qui accompagne nécessairement l’acte du rire. (Comparer à ce point de vue les nos 5 et 6 de la planche 51.)

111. — Ces notions abrégées doivent nous apprendre à rectifier par la pensée le dessin physionomique d’une photographie de face, où la présence de rides accentuées ferait présumer l’existence de quelques contractions musculaires déformatrices. Ainsi, par exemple, comme il a été déjà indiqué à l’article sourcils (§ 62), un même sujet photographié en deux endroits différemment éclairés, pourra être représenté, ici avec des sourcils arqués et normalement espacés sur un front pur de toute ride, et là avec des sourcils rectilignes, à têtes rapprochées et séparées par une ou plusieurs rides intersourcilières.

Elles nous permettent également de deviner les divergences physionomiques que peut amener l’effacement des rides sur les portraits photographiques retouchés du commerce, et les difficultés qui peuvent en résulter pour l’identification de deux photographies de face.

112. — Il ne faudrait pas croire d’ailleurs que les cinq sortes de contraction péri-oculaire que nous venons de décrire (élévation totale ou partielle, rapprochement ou abaissement des têtes de sourcils et patte d’oie) soient observées indistinctement et dans la même proportion sur tout le monde. Chacun a sur ce point sa façon instinctive d’agir qui lui est propre et dont il ne se départit guère.

Sans entrer dans des discussions de philosophie esthétique, disons pourtant en passant qu’il serait téméraire d’y chercher un pronostic moral de l’individu. Les rides, si différentes dans leur tracé, ont en général une origine physiologique commune : les efforts de l’organisme pour faciliter la vision et ménager la susceptibilité du globe oculaire, contre les excès de lumière, la poussière, le vent, etc.

113. — C’est pourquoi les règles de la photographie judiciaire, non seulement interdisent tout effacement de rides, mais ne redoutent pas de les accentuer en plaçant le sujet à photographier en pleine lumière. On obtient ainsi un rictus physionomique qui rappelle quelque peu celui d’une personne qui, au sortir de l’intérieur obscur d’une habitation, pénètre subitement dans une rue ensoleillée. Si cette légère contraction faciale, qu’il ne faudrait pourtant pas pousser à l’exagé-