Page:Bertillon - Identification anthropométrique (1893).djvu/15

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
V
AVERTISSEMENT

d’en tirer en un mot tout ce qu’il est possible d’en tirer : car il faut, pour bien voir ou mieux pour percevoir ce que l’on voit, connaître d’avance quels sont les points à regarder.

C’est l’idée que le célèbre anatomiste Peisse a résumée en cette sentence que le Dr Paul Richer a mise en épigraphe à son récent et magnifique traité d’anatomie artistique : « l’œil ne voit dans les choses que ce qu’il y regarde et il ne regarde que ce qui est déjà en idée dans l’esprit ».

Nous avons déjà eu l’occasion d’exposer dans un petit opuscule sur la photographie judiciaire[1] que le meilleur et même le seul moyen pour un agent d’imprégner sa mémoire visuelle d’un portrait photographique était d’en faire par écrit une espèce de description morphologique exacte et complète : « On l’a dit depuis longtemps, nous ne pensons que ce que nous pouvons exprimer par la parole. Il en est de même du souvenir visuel, nous ne pouvons revoir en pensée que ce que nous pouvons décrire. L’agent chargé d’une mission aussi difficile que de rechercher et d’arrêter un criminel à l’aide d’une photographie, doit être à même de réciter et de décrire de mémoire la figure de celui qu’il poursuit, d’en faire, en un mot, une espèce de portrait parlé. C’est la meilleure manière de prouver à ses chefs qu’il a pris à cœur la tâche qu’on lui a confiée. »

Ces prescriptions ont reçu, depuis leur publication dans l’ouvrage que nous venons de citer, la haute et complète approbation de MM. Lozé, préfet de Police ; Viguié et Cavard, chefs de son cabinet ; Goron, chef du service de la Sûreté à Paris ; Taylor, ancien chef de la Sûreté ; le Dr Guillaume, secrétaire général de l’association pénitentiaire internationale ; Le Royer, sous-secrétaire du département de Justice et Police de Genève[2] ; Mac Claughry, chef de la Police de Chicago, etc.

  1. Paris, Gauthier-Villars, 1890.
  2. « Il faut donner aux agents de police une instruction qui leur permette d’utiliser avec fruit une fiche munie d’une photographie, par exemple de savoir reconnaître une oreille, car cette partie du corps est la plus importante à ce point de vue et fournit des indications nombreuses et précieuses qui ne permettent pas de confusion. » (H. Le Royer, lio jur. in Revue pénale suisse, 4e année.)