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iv
AVERTISSEMENT

N’est-il pas étonnant que tandis qu’il y a eu de tous temps, sous le nom d’hippologie, des ouvrages spéciaux pour la description précise des formes et de la robe du cheval, il n’existait pas jusqu’à présent, à notre connaissance, un traité méthodique du signalement humain.

La cause doit en être recherchée dans la difficulté du sujet, notamment dans la multiplicité des points de vue qu’il comporte. Nous ne croyons pas être loin de la vérité en disant que le nombre des pages consacrées à l’exposition de chacune des trois parties de notre signalement (anthropométrie 25 pages, description 67 pages et marques particulières 20 pages) est respectivement proportionnel aux difficultés soulevées pour la mise en pratique de chacune d’entre elles. Sous ce rapport, la partie anthropométrique doit donc être considérée comme étant beaucoup plus aisée que la partie descriptive. Ajoutons d’ailleurs que la connaissance immédiate et intégrale des pages relatives à la description n’est pas indispensable et qu’il est même recommandé d’en ajourner l’étude pour la fin de l’apprentissage. Leur principal but est d’enseigner à regarder la figure humaine et à en garder le souvenir, soit qu’on ait affaire à un sujet vivant, ou à un portrait photographique. Elles s’adressent donc encore plus à l’officier de police judiciaire qu’au gardien de prison.

S’il est un lieu commun en police, c’est bien le peu d’utilité de la photographie pour arriver jusqu’au malfaiteur en fuite. — « Autant elle serait excellente, dit-on, pour confirmer une identité soupçonnée, autant elle serait insuffisante comme moyen de recherche, et il arriverait journellement aux limiers les plus consciencieux de passer à côté d’un type dont ils auraient l’image en poche sans le reconnaître. » Certes, il y a un peu de contradiction à attribuer ces insuccès à l’insuffisance de la photographie tout en lui reconnaissant une puissance d’identification aussi considérable. Nous affirmons et nous croyons avoir démontré que le portrait photographique deviendrait un instrument de recherche et de reconnaissance bien autrement efficace si les agents étaient plus familiarisés avec la façon de s’en servir, de l’analyser, de le décrire, de l’apprendre par cœur,