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LA TOUR DU TÉLÉGRAPHE

— Il importe de s’assurer si cette opinion est fondée et si vous n’avez pas été tous victimes d’une abominable spoliation… Seulement il faudra établir d’une manière nette et précise que M. Fleuriot est bien l’auteur de la découverte.

Or, comment établir cela si Ducoudray osait soutenir le contraire ? Voyons, mademoiselle, votre frère n’aurait-il pas conservé certains documents, certains papiers, une copie de son livre de signaux, quelque chose enfin qui puisse le faire reconnaitre pour l’auteur véritable du nouveau système télégraphique !

Fanny, en posant cette question d’une si haute importance pour elle, parlait du ton calme et bienveillant d’une grande dame qui a pour unique mobile l’intérêt de ses pro tégés.

— Hélas ! madame la marquise, répliqua Lucile, je ne sais que répondre sur ce point. Raymond ne nous a jamais rien dit. Après le renversement de ses espérances, il brûla une énorme quantité de paperasses qui lui avaient servi dans son travail ; mais a-t-il conservé la copie dont vous parlez, je l’ignore… Cependant, ajouta-t-elle aussitôt d’un air de réflexion, vous m’y faites penser… Il y a quelques mois, un jour que je mettais un peu d’ordre dans sa chambre, il ouvrit en ma présence une armoire où il serre ses effets les plus précieux. Un coup d’ail jeté par hasard dans ce meuble me permit de remarquer une espèce de registre dont je ne m’explique pas l’usage, car Raymond n’a pas d’affaires et c’est notre mère qui tient les comptes de la maison… Si ce registre était le livre des signaux !

— Il faudrait s’en assurer, mademoiselle, dit Fanny avec la même tranquillité ; car il serait fâcheux de porter contre Ducoudray ou toute autre personne une accusation dont on ne pourrait fournir la preuve.

— Sans doute, mais Raymond ne laisse jamais son ar moire ouverte, et je n’ai aucun moyen de vérifier…

— Eh ! ma chère, qu’est-il besoin de tant de mystères ?