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LA TOUR DU TÉLÉGRAPHE

cet état. Pour moi, je monte au télégraphe tous les jours et je n’ai plus peur depuis longtemps.

Fanny se tourna vers elle.

— Mademoiselle Lucile Fleuriot, je crois, dit-elle en souriant ; l’institutrice du village de Puy-Néré ?… J’ai beaucoup entendu parler de vous, mon enfant, et je suis fort disposée à vous aimer.

Elle lui tendit sa main finement gantée, que la petite prit avec respect.

— Ah ! madame la marquise, je ne mérite pas… je n’ai rien fait pour être digne…

— Il n’est bruit dans le pays que de vos qualités aimables, et je peux juger par moi-même combien vous êtes charmante… Aussi j’espère, mademoiselle, que nous ferons plus ample connaissance.

Lucile ne savait comment répondre à tant de prévenances. Raymond, qui observait tout de son weil pénétrant, dit à sa sour :

— Monsieur et madame t’excuseront, Lucile… Mais voici l’heure de l’école, et notre mère a sans doute besoin de toi.

— C’est vrai, Raymond… je pars.

Elle adressa une révérence aux visiteurs et disparut dans la cage de pierre qui recouvrait l’escalier de la tour ; on entendit encore tinter les ustensiles de ménage que contenait son panier, longtemps après qu’on pe la voyait plus.

Raymond demeurait immobile et silencieux à l’entrée de la cabane. Cransac lui dit avec politesse :

— Nous serions désolés de vous déranger de vos occupations, monsieur l’employé ; le devoir avant tout, et vous avez sans doute autre chose à penser qu’à nous faire les honneurs de cette masure.

— C’est vrai, répondit Fleuriot avec sa brusquerie habituelle ; pardonnez-moi donc si je retourne à mon ou-