Page:Berthet — La tour du télégraphe, 1870.pdf/52

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
52
LA TOUR DU TÉLÉGRAPHE

étrangères aux notions les plus simples et les plus indispensables.

Ce fut en ce moment que la voix de Raymond s’éleva dans l’intérieur de la cabane et bientôt il apparut lui-même. Il manifestait, comme nous l’avons dit, quelque mécontentement à la vue des visiteurs ; ceux-ci essayèrent de l’adoucir par leurs manières polies et leur affabilité.

— Un télégraphe ! répéta Fanny en considérant la machine ; oh ! la singulière chose ! et à quoi cela sert-il ?

— Ah ! monsieur l’employé, dit Hector en souriant, nous sommes en faute, je crois, et nous avons violé une consigne ; mais il faut pardonner quelque chose à un proprié taire qui veut faire connaissance avec sa propriété… Cette vieille construction m’appartient, et c’est à moi désormais que l’État doit en payer la location, si location il y a… Je suis donc fort excusable « de monter à ma tour » comme madame Marlborough, non pour « voir venir mon page, » mais pour contempler le beau spectacle dont on jouit d’ici et admirer mes domaines… Sans compter qu’en ma qualité de propriétaire, je suis obligé à toutes les réparations urgentes, et véritablement cette tour penche autant que la tour de Pise ou celle de Bologne.

Tout cela était débité d’un air à désarmer le fonctionnaire le plus féroce. Mais Raymond Fleuriot ne semblait pas écouter ; son œil de feu se fixait sur Fanny qui baissait modestement la tête, et il balbutiait avec distraction :

— Certainement, monsieur, vous avez le droit… La consigne ne saurait être pour vous… et pour madame.

— Vous avez raison, Hector, dit Fanny en faisant une grimace d’effroi ; cette tour penche d’une manière alarmante… Si elle allait s’écrouler pendant que nous sommes ici !

— Rassurez-vous, madame, répliqua Lucile avec timidité ; il y a plus de cent ans, dit-on, qu’elle se trouve dans