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LA TOUR DU TÉLÉGRAPHE

avec précipitation, en remettant dans un panier les usten siles qui avaient servi au repas de son frère ; les enfants de l’école doivent être arrivés et la mère est si faible avec eux qu’elle n’en peut venir à bout… Je vais bien vite la délivrer.

En ce moment, Jean Bascoux, le surnuméraire, dit avec son accent angoumoisin :

— Eh ! tout de même, monsieur Fleuriot, voilà Paris qui se remet à marcher !

Raymond approcha l’œil de la lunette qui était braquée sur le télégraphe de Paris, et put reconnaître qu’en effet les bras de la machine avaient changé de position. Il courut aussitôt à la manivelle de son télégraphe et répéta le signal observé. Puis, après avoir tracé rapidement quelques lignes sur le registre destiné à cet usage, il se dirigea vers la lu nelte placée au côté opposé de la cabane, afin de s’assurer si le poste suivant’avait vu et opéré la même manœuvre.

Lucile savait que son frère, dans l’exercice si délicat de ses fonctions, n’aimait pas à être dérangé. Toutefois, ayant repris son chapeau de paille et passé le bras dans l’anse de son panier, elle demanda :

— À quelle heure descendras-tu, Raymond ?

— Pas avant midi, et encore si Morisset est exact à me remplacer… Mais c’est aujourd’hui le jour d’ouverture de la chasse, et l’enragé braconnier s’attardera peut-être dans la lande.

— Eh bien donc, à midi.

Et Lucile allait décidément sortir, quand Raymond, qui continuait à « manipuler » lestement son télégraphe, s’écria tout à coup :

— Tiens ! l’indicateur de gauche vient de battre deux fois là-bas avant de prendre la position actuelle !… Nous savons ce que cela veut dire, ajouta-t-il en répétant la manœuvre signalée ; les camarades nous annoncent que l’ins-