Page:Berthet — La tour du télégraphe, 1870.pdf/45

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
45
LA TOUR DU TÉLÉGRAPHE

riches paysannes et même des petites bourgeoises des en virons.

L’histoire du frère et de la sœur, antérieurement à l’époque où nous sommes, présentait peu d’incidents remarquables, bien qu’elle ne pût manquer d’éveiller la sympathie en leur faveur. Ils étaient nés l’un et l’autre dans une petite ville de la Touraine. Leur père, fonctionnaire public de l’ordre le plus humble, leur avait fait donner une education convenable, et Lucile avait subi à Tours les examens pour obtenir le diplome d’institutrice. Quant à Raymond, qui s’était engagé dans l’espoir d’obtenir promptement l’épaulette, nous avons dit comment une malencontreuse blessure était venue renverser ses espérances. Mis à la réforme, il avait dû rentrer dans la vie civile, et pour vivre il avait sollicité et obtenu le poste modeste d’employé au télégraphe.

Aussi bien, un malheur survenu dans sa famille rendait presque indispensable sa présence auprès de sa mère et de sa sœur. Son père venait de mourir, laissant les deux pauvres femmes sans fortune et sans appui. Raymond accepta avec dévouement ses nouveaux devoirs. Il prit avec lui sa mère et Lucile, et d’abord tout parut leur réussir, Fleuriot était alors employé dans les environs de Tours, où les siens et lui jouissaient d’une sorte de bien-être. Mais un caprice de l’administration l’ayant envoyé depuis quelques mois dans ce pays pauvre et solitaire de Barbezieux, la prospérité relative de la famille avait cruellement décliné.

Cependant les Fleuriot ne s’abandonnaient pas eux-mêmes et cherchaient à tirer le meilleur parti de leur exil. Raymond, aux heures où il n’était pas de service, copiait des actes que lui confiaient le notaire et l’huissier d’une bourgade voisine. Lucile avait fondé une école qui réunissait une douzaine de petits enfants, filles et garçons, et elle ajoutait ainsi de minces subsides au budget de la famille. Quant à la vieille mère Fleuriot, que nous connaitrons plus