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LA TOUR DU TÉLÉGRAPHE

leur poste, et vous autres continuez votre tournée… Il faut obéir à M. Fleuriot, c’est l’ordre.

Aussitôt la troupe se dispersa ; tandis que les soldats se retiraient au pas cadencé, les agents disparaissaient dans l’obscurité de la rue. Alors le chef de la police dit avec déférence à Fleuriot :

— Sur ma foi ! monsieur, je commençais à craindre pour vous ; car, s’il faut l’avouer, la maison de Bras-de-Singe n’a pas bon renom… Mais ne savez-vous rien au sujet de ce maudit Cransac, qui nous met sur les dents ?

— Il m’a encore échappé ; cependant je ne perds pas l’espoir de le rejoindre. Où donc était-il caché ?

— Peu importe maintenant ; il a quitté Bordeaux…

— Quant à moi ; je serai à ses trousses, je l’espère, avant le jour.

— Ne pouvez-vous me communiquer les renseignements que vous avez recueillis ?

Fleuriot lui apprit en peu de mots ce qu’il savait des projets de Cransac.

— À merveille, reprit le chef de la police ; « parti à minuit sur un cheval bai-brun un peu rétif, a pris la route de Montauban… » Je vais donner ces détails à la gendarmerie et on lancera une brigade entière dans cette direction…

— Eh bien, monsieur Fleuriot, vous devriez vous reposer et nous laisser faire maintenant ; vous le voyez, jusqu’ici, ce satané Cransac s’est trouvé le plus fin !

— Aussi, ai-je à cœur de prendre ma revanche.

Raymond salua et s’éloigna rapidement avec Jacques Rouget.

Celui-ci était tout abasourdi de ce qui venait de se passer. Quand on eut gagné le quai, il dit à son compagnon d’un ton respectueux :

— Ah çà ! ami soldat, qui diable êtes-vous ? Les requins de terre vous obéissent au doigt et à l’œil. Vous devriez