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LA TOUR DU TÉLÉGRAPHE

Il offrit une somme qui égalait la moitié de son avoir ; mais Bras-de-Singe fit une grimace dédaigneuse.

— Je ne loue pas mes chevaux, répliqua-t-il d’un ton sec ; n’en parlons plus.

En ce moment on frappa réellement à la porte de la rue et un murmure de voix s’éleva, comme si un grand nombre de personnes stationnait devant la maison. Bras-de-Singe devint pâle ; Fleuriot tira sa montre.

— C’est la police, dit-il ; la demi-heure est expirée. Mille millions de diables ! s’écria le maquignon qui oublia tout à coup son maquignonage ; s’ils entrent ici, je suis flambé.

— Et moi donc ! dit Victorin avec terreur, je ne suis pas en règle non plus, et, si l’on s’avise de m’éplucher…

— Que voulez-vous que j’y fasse ? répliqua Fleuriot. Le bruit redoubla au dehors.

— Ouvrez ! criait-on, ouvrez, au nom de la loi !

Bras-de-Singe n’y tint plus.

Monsieur, dit-il précipitamment à Fleuriot, vous aurez mon cheval, vous le garderez tant que vous voudrez, vous m’en payerez la location comme il vous plaira ; mais, je vous en supplie, renvoyez-les bien vite ou je suis ruiné, coulé à fond, perdus corps et biens.

— Renvoyez-les, monsieur, dit à son tour Victorin qui pleurait, et je vous fournirai les moyens de retrouver votre Ponentais, je vous le jure… Je sais des choses dont on ne se doute pas ; mais comment pourrai-je vous les dire si l’on me met en prison ?

À la bonne heure ! reprit Fleuriot ; eh bien, père Michonet, demain, à trois heures du matin, c’est-à-dire dans quelques heures d’ici, votre cheval tout sellé et bride sera conduit à la porte de mon auberge. Ce jeune garçon me l’amènera ; en même temps, il me donnera les renseignements qu’il m’annonce, et pour lesquels il sera généreusement récompensé… Est-ce entendu ?