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LA TOUR DU TÉLÉGRAPHE

ral ; j’aime le noble amour-propre qu’il met à obtenir justice par lui-même ; c’est de l’excellent esprit de corps. Laissons-le donc aller, messieurs ; il est trop intéressé dans l’affaire pour qu’il n’y emploie pas tout son zèle, toute son énergie, toute son intelligence. Quant à moi j’ai en lui une confiance entière, tandis que, je l’avoue, je me méfie un peu de la maladresse de vos agents.

— Allons ! allons ! monsieur le directeur général, dit le haut fonctionnaire avec un léger sourire, un peu de charité pour notre pauvre police locale ! Nous ne sommes plus à Paris, il est vrai, mais nous parvenons encore à faire exécuter nos ordres. Du reste, je ne vois aucun inconvénient à ce que ce jeune homme soit laissé libre d’agir sous sa responsabilité, en lui rappelant toutefois que la loi punit certains excés de colère et de violence. Cela n’empêchera pas la police de se mettre en campagne, et l’on verra qui atteindra le but le premier !

— Je parie pour mon champion, moi ! dit le directeur général.

L’affaire étant ainsi réglée, on invita M. R*** à conduire l’employé chez le juge instructeur qui devait l’interroger d’urgence.

— Adieu donc, monsieur Fleuriot, reprit le directeur général ; je compte sur vous, sur votre dévouement pour effacer la honte que subit notre administration. Tant que votre livre des signaux ne m’aura pas été remis, je serai en droit de suspecter votre véracité, ne l’oubliez pas !

— Vous l’aurez, monsieur, vous l’aurez, je vous jure ! s’écria Raymond. En sortant de chez le juge d’instruction, qui, sur l’ordre supérieur, avait reçu la déposition de Fleuriot, malgré l’heure avancée, M. R*** dit à l’employé :

— Eh bien ! mon garçon, vous n’êtes pas faché, j’imagine, de m’avoir rencontré aujourd’hui ? Tout marche à