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LA TOUR DU TÉLÉGRAPHE

à un de ses agents d’aller voir de quoi il s’agissait. L’agent revint au bout d’un moment.

— Monsieur, dit-il, un individu que nul ne connait, et qui ne semble pas appartenir à la maison, a refusé de s’arrêter quand on lui en a intimé l’ordre et a pris la fuite. Mais pos hommes lui donnent la chasse, et, comme toutes les issues sont gardées, ils ne peuvent manquer de l’atteindre.

Si le magistrat s’était tourné vers Colman et Fanny, il les eût vus pâlir sensiblement.

— Qu’on m’amène cet individu aussitôt qu’on l’aura pris ! dit-il.

Un seul des gens de police resta dans le pavillon, tandis que les autres allaient prêter main-forte à leurs camarades. Comme Fanny et Colman se taisaient, le magistrat demanda au banquier :

— Connaissez-vous la personne qui redoute si fort d’être mise en présence de la justice ?

— Comment le saurais-je ? répliqua Colman, dont le ton bourru dissimulait mal l’anxiété.

Une chasse vive et acharnée se continuait au dehors. Des gendarmes et des hommes de police poursuivaient l’inconnu, qui les évitait avec agilité. La nuit était sombre, et les flambeaux que l’on portait s’éteignaient dans la rapidité de la course. Les allées tournantes, les massifs de feuillage, qui formaient une sorte de labyrinthe, rendaient la fuite facile à quelqu’un qui en connaissait les détours. Cependant toute retraite paraissait impossible ; il y avait des factionnaires à toutes les portes, et les murs, hauts de vingt pieds, se trouvaient dans le meilleur état. Le fuyard ne pouvait donc échapper, et sa prise, pour être retardée, n’en était pas moins inévitable.

Bientôt la poursuite se concentra dans la partie la plus fourrée du jardin. Là, de grands arbres dominaient non-seulement les murs de clôture, mais encore les toits de