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LA TOUR DU TÉLÉGRAPHE

— Et quand cela serait ?

— Vous l’avouez donc ? En ce cas, je ne saurais vous permettre de sortir sans vous avoir interrogée sur des événements qui doivent être à votre connaissance.

Et il fit signe à un de ses hommes de veiller sur elle. Fanny comprit qu’elle était bien et dûment arrêtée. Son assurance fléchit aussitôt ; elle se laissa tomber sur le divan, et s’écria en fondant en larmes :

— Mon Dieu ! que me veut-on ? Si c’est à cause deM. de Cransac qu’on me persécute, j’ai rompu avec lui, je ne le connais plus, je ne suis solidaire d’aucun de ses actes.

Colman à son tour parla bas au juge ; il s’efforça de prouver que la jeune femme, qui se trouvait chez lui par hasard, ne pouvait être impliquée en rien dans ses affaires. Le magistrat écoutait d’un air distrait et ne paraissait nullement disposé à révoquer son ordre. Cependant Colman ne désespérait pas de le convaincre, pourvu qu’une circonstance nouvelle ne vint pas compliquer la situation.

Il s’inquiétait surtout de Cransac, qui devait être dans la loge du portier au moment de la descente de justice. Si le vicomte avait fui sans être reconnu, peut-être pourrait-on encore donner aux événements un tour favorable ; mais s’il était surpris dans la maison nanti du livre des signaux, les plus fâcheuses complications étaient à craindre.

Une circonstance rassurait Colman. On avait laissé sortir la vieille Bourachon, qu’il semblait inutile de surveiller. Certainement cette femme, dont le maître du logis connais sait la finesse, avait dû prévenir Cransac de ce qui se passait et lui fournir les moyens de quitter la maison, malgré l’active surveillance exercée par la force publique.

Il n’en était pourtant pas ainsi. Bientôt une nouvelle rumeur s’éleva dans le jardin. On s’appelait à voix haute, on courait dans les allées ; des lumières s’agitaient çà et là. Le magistrat cessa d’écouter Colman et commanda tout bas