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LA TOUR DU TÉLÉGRAPHE

pitaine au long cours dont le navire est attendu. Je me suis empressée de vous écrire, afin de vous demander une entrevue, pour ce soir, car je n’osais venir en plein jour, et je suis heureuse de pouvoir vous mettre en garde contre toutes les éventualités.

Le gros Hambourgeois l’avait écoutée en se dandinant, le sourire sur les lèvres, et il paraissait beaucoup plus occupé de la narratrice que de la narration même.

— Merci, ma belle, reprit-il d’un ton galant ; mais n’ayez aucun souci en ce qui me regarde ; j’ai prévu ce qui arrive, et je n’ai négligé aucune précaution. Le bon papa Colman ne se laisse pas ainsi rouler… Ah çà, vous avez donc réussi à vous emparer du livre des signaux ?

— Et tout l’honneur de cette conquête doit vous revenir, monsieur Colman : vos mesures étaient si admirablement prises ! Nous ne pouvions pas ne pas réussir, quoique Cransac ait commis fautes sur fautes. Mais, àà propos de Cransac, n’avez-vous pas reçu de ses nouvelles ? Il est sûrement dans la ville.

— Il ne m’a pas encore donné signe de vie ; et, si les choses sont comme vous le dites, je doute qu’il ose venir à Bordeaux.

— Oh ! il viendra certainement. Peut-être a-t-il l’intention de passer à l’étranger ; mais il ne quittera pas la France sans vous faire payer les frais du voyage.. Oubliez-vous que vous lui avez promis une somme considérable pour prix de ce livre des signaux télégraphiques ?

— C’est vrai. Eh bien, Fanny, ce livre pourra-t-il rendre autant de services qu’on le suppose ?

— J’en ai vu faire deux fois l’expérience ; une par Fleuriot, l’autre par le vicomte lui-même, et ils ont déchiffré les dépêches sans hésitation.

— À merveille, reprit le banquier, qui ne put conte nir sa joie. Au moyen de ce livre précieux, je n’aurai plus